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Finale de la Coupe du Cameroun : Comment le Chef de l’État « tue » le jeu

Si la présence du président de la République reste une motivation pour les équipes de football engagées, il n’en demeure pas moins qu’elle devient également nocive à leur épanouissement, pour quatre raisons précises.

C’est un rituel : chaque année, le chef de l’État préside la clôture de la saison sportive. Apothéose solennelle autour d’un match de football. Pour 2018, la finale dont la date reste inconnue, opposera Eding sport de la Lékié à Lion blessé de Fotouni. Les deux équipes ont décroché leurs tickets qualificatifs en septembre dernier. Dans l’attente effrénée du grand jour, elles se font tout le temps narguer sur la date exacte.

Les différents staffs techniques programment et déprogramment les stages de préparation. Les championnats nationaux, Ligue 1 et 2 étant achevés depuis quatre mois, les joueurs errent dans les quartiers. « Nous les regroupons dès qu’il y a une alerte. Quand on se rend compte qu’elle est fausse, nous les renvoyons chez eux, faute de moyens pour les maintenir en stage. Chez eux, où ils vivent avec femmes et enfants et se livrent à tous les excès. On ne sait ce qu’ils mangent ou à quels types d’activités ils se livrent. Chaque fois qu’on les regroupe, tout est à refaire en terme de remise en forme. », se plaint l’entraineur d’une des équipes finalistes.


La confusion autour de la date de la finale entretient également le flou sur l’identité du deuxième représentant du Cameroun à la Coupe des Confédérations de la CAF qui débute en décembre prochain. Le ticket qualificatif revenant au vainqueur de la Coupe du Cameroun.

A côté de ces impacts négatifs causés par le mystère sur la date de la finale, l’excès de protocole autour de l’évènement ne serait pas aussi sans conséquences. En temps ordinaires, y compris lors des matchs internationaux, il est prévu que les équipes rallient le stade de compétition deux heures maximum avant le coup d’envoi de la rencontre. Mais pendant la finale de la Coupe du Cameroun, le protocole d’État exige que les finalistes soient là bien plutôt. « _Ça contribue à foutre une pression énorme ! Parfois, nous n’avons plus l’impression qu’il s’agit d’un simple match de football tel que nous avons l’habitude de jouer. La présence du président est déjà assez stressante, pour qu’on modifie encore les règles de préparation. Ça rend l’atmosphère lourde pour ces enfants» , témoigne le préparateur physique d’une équipe autrefois finaliste.

Là où le bât blesse, et semble d’avantage heurter la sensibilité des acteurs, c’est que les joueurs n’ont pas le droit de s’échauffer sur la pelouse avant le match comme il est de tradition. Arrivés au stade, les finalistes ne foulent la pelouse que pour saluer le chef de l’État au moment de son arrivée. Les étirements et autres, préalables pour disputer les 90 minutes de jeu, semblent être jugés inutiles par le protocole d’État et le Comité d’organisation. D’où, selon certains analystes, la survenue régulière des crampes et des blessures pendant les éditions de finales de Coupe du Cameroun.

En cas d’égalité au termes des 90 minutes de jeu, les équipes n’ont pas droit à des prolongations. Au fil des années, cette phase a disparu des usages. C’est que désormais, durant la finale de la Coupe du Cameroun, les deux protagonistes ont l’obligation de se départager pendant le temps réglementaire, au quel cas, l’on procède immédiatement aux tirs au but. « Le Cabinet civil s’est rendu compte que les prolongations perdaient du temps au président de la République. Il y a quelques années, on nous avait instruit, et cela demeure jusqu’à ce jour, de passer tout droit aux penaltys si le score est de parité à la fin des 90 minutes. Celui qui perd a perdu », conclu fatalement un ancien arbitre à la retraite.

Sans doute, la finale 2018 de la Coupe du Cameroun tant attendue n’échappera pas aux mêmes contraintes protocolaires. C’est aussi ça la facture amère de la politisation du sport.

 

 

Par Christian Djimadeu

 

 

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