A La UneTennis

OU EST PASSE LE TENNIS DANS LE SEPTENTRION ?

Sport de seconde zone, la discipline est en léthargie dans le Grand Nord

Maroua, complexe sportif, il est 16 heures. Comme chaque après-midi, une dizaine de joueurs, vétérans et seniors, ont pris d’assaut les deux courts de tennis vétustes, les seuls de la ville, et se livrent à de longs échanges de balles. Ce spectacle auquel se consacrent avec délectation les amoureux de la petite balle verte masque pourtant une triste réalité : la petite place qu’occupe le tennis dans les régions septentrionales. «Les populations de l’Extrême-Nord s’intéressent au tennis, mais la cherté du matériel, le manque d’infrastructures et les préjugés découragent bon nombre de personnes», explique Robert Tchoubo, entraineur de tennis à Maroua. En outre, poursuit-il, «l’absence de compétitions ramollit les quelques joueurs en activité, car pour progresser dans le tennis, il n’y a pas de secret. Il faut se frotter à la meilleure concurrence, au risque de stagner». Autrement dit, il faut sortir de son carcan du GrandNord pour aller défier d’autres talents à Yaoundé et Douala principalement. Le constat est triste, mais la réalité est que les champions des trois régions septentrionales n’affichent aucune compétition nationale au compteur. C’est le cas du jeune Emmanuel Nguinambaye, champion senior du Nord. Un sérieux handicap pour la carrière de ce joueur talentueux. Dametsey Sayel, entraineur régional du Nord, ne s’inscrit en faut. Il pointe les difficultés auxquelles est confronté le tennis dans la partie septentrionale, avec notamment des problèmes logistiques auxquels s’ajoutent les absences aux compétitions nationales. «Le fait de ne pas pourvoir prendre part aux compétitions nationales est un handicap, car ça nous bloque parce que nous ne sommes pas jugés sur la base de nos compétences», souligne-t-il. Pratiquant avant de devenir entraîneur, Robert Tchoubo ne voit pas l’avenir du tennis en rose dans le Grand-Nord. «Le tennis est un sport très difficile dans la mesure où, contrairement au football, très peu de joueurs dans le monde vivent convenablement de ce sport tellement exigeant sur le plan financier et physique», fait-il remarquer; avant de poursuivre : «Pour réussir, il faut une volonté de fer pour s’imposer d’abord sur les courts, mais aussi de l’argent pour investir au départ sur sa propre carrière.

Or, le Grand-Nord manque un peu de tout, à la fois sur le plan matériel, financier et du désir individuel». De fait, les ligues régionales répondent d’ordinaire aux abonnés absents pour ce qui est de l’organisation des activités, laissant le soin aux différents clubs de tennis de se battre chacun à son niveau pour initier des tournois et autres activités en direction du grand public, avec l’appui des mécènes. C’est le cas de l’école de tennis de l’hôtel Bénoué à Garoua qui, grâce à un appui de matériel de l’Ong Oyebog, organise chaque année pendant quinze jours, une kermesse et des séances gratuites d’apprentissage du tennis. Une initiative qui porte tout de même des fruits. «A Ngaoundéré, nous avons un enfant qui est parti aux Etats-Unis grâce à l’Ong Oyebog. Et j’espère que notre champion senior à Garoua, qui est un très bon tennisman, mais qui n’a pas pu aller à l’école faute de moyens, car il est orphelin de père et de mère, sera copté par des mécènes qui pourront l’aider à intégrer un centre de formation en Europe», explique Modeste Dametsey Sayel.


Comment sortir de ce sombre avenir ? Joueurs et dirigeants pointent un doigt accusateur sur la fédération, et en premier lieu son président. «Le tennis dans les régions septentrionales est à l’image de la fédération qui manque de considération à notre égard. Elle est moribonde. Ne nous voilons pas la face, si l’on avait à la tête de la fédération un homme soucieux du développement du tennis, bien sûr que cela se ferait ressentir ici. Il a tout abandonné entre les mains des privés, sauf qu’ici, le tennis n’étant pas de tradition et que de grosses structures étant peu ou prou installées, qui va investir dans l’organisation des tournois ? La Fédération devrait compenser ce vide, mais là, on a un président totalement déboussolé. Le Grand-Nord n’est pas seul dans ce cas, c’est le pays qui est malade de son tennis. Il faut faire quelque chose», martèle un entraîneur local

Ebah Essongue Shabba

Commentaires Facebook

0 commentaires

Articles similaires

Bouton retour en haut de la page