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Emmanuel Nyambi : « Sans football des jeunes, il n’y a pas de football professionnel »

Acteur incontournable de la formation depuis plus de trois décennies, Emmanuel Nyambi tire une nouvelle fois la sonnette d’alarme sur l’état du football des jeunes au Cameroun. Président-fondateur du CETEF de Bonabéri – centre qui, entre 2005 et 2008, a contribué à l’émergence de nombreux talents – et promoteur de plusieurs académies dont la plus récente, Atlantique, Nyambi consacre depuis 33 ans sa vie à l’encadrement des jeunes footballeurs. Lors de la cérémonie de dédicace de l’ouvrage de Georges Kalgong, intitulé : « Réinventer le football camerounais, une vision pour la renaissance de la Fecafoot » il est revenu avec franchise sur son parcours, les dysfonctionnements qui plombent le football de base et les réformes indispensables pour assurer l’avenir du sport roi au Cameroun.

Un engagement de longue date pour la formation

Recruté dès 1999 comme détecteur de talents pour l’École de Brasserie de Douala, Nyambi a contribué à révéler de futurs grands noms du football camerounais. « Nous allions dans chaque quartier pour identifier le meilleur joueur, et nous avions réussi », se rappelle-t-il.


Pour lui, le problème ne vient pas d’un manque de talents, mais de l’absence d’une politique cohérente et durable. Depuis le départ d’Iya Mohammed de la FECAFOOT, il estime que le football des jeunes est « mort depuis 12 ans », sacrifié au profit d’un pseudo-football professionnel.

Des structures sacrifiées au profit d’intérêts personnels

Emmanuel Nyambi fustige la tendance des exécutifs successifs à dissoudre les ligues autonomes de football jeunes pour les réduire à de simples commissions. « Tous ceux qui viennent à la fédération, qu’ils m’excusent, ne viennent que pour leurs propres intérêts », tranche-t-il.

Il dénonce également :

  • l’augmentation exorbitante du coût des licences (de 500 à 5 000 francs CFA), qui freine l’accès des jeunes aux compétitions,
  • l’utilisation opaque des financements, rappelant qu’en 2006 une entreprise de communication avait versé plus de 60 millions pour le football des jeunes, sans impact réel,
  • la sélection biaisée des U17, davantage basée sur les amitiés et affinités que sur la performance.

Une base inexistante, un sommet fragile

Pour Emmanuel Nyambi, le mal est structurel : « Chaque exécutif recommence à zéro pour le football des jeunes. Or, au fur et à mesure que la base est large, le sommet est sélectif. » Il réclame un véritable championnat national des jeunes, avec des catégories bien structurées (U9, U11, U13, U15, U17, U18), afin que les joueurs arrivent en première division avec les fondamentaux techniques et tactiques. « Quand je regarde certains matchs de première division, je vois des joueurs incapables de contrôler un ballon. C’est le signe qu’il n’y a pas de politique de formation sérieuse », regrette-t-il.

Le plaidoyer pour un football des éducateurs et non des opportunistes

Selon Nyambi, le football des jeunes doit être confié aux véritables acteurs de terrain : éducateurs, journalistes sportifs, formateurs et supporters. « Être ancien joueur ne suffit pas pour diriger le football. Il faut avoir fait ses classes, travailler avec les jeunes au quotidien », insiste-t-il. Il cite l’exemple du lion indomptable Carlos Baleba, jeune joueur formé dès son plus jeune âge par son père, éducateur, qui illustre la réussite de l’accompagnement à la base.

Un appel à fédérer les énergies

Malgré les obstacles, Emmanuel Nyambi reste combatif. À travers ses trois académies et ses déplacements dans tout le pays – y compris à Bamenda en pleine crise sécuritaire – il continue d’investir, dépensant « au moins 1 million par an » pour le football jeunes, sans soutien institutionnel. Son combat est clair : redonner vie au football de base. « Sans football des jeunes, il n’y a pas de football professionnel. Nous devons fédérer nos énergies pour reconstruire à partir de la base. »

Pour lui, le Cameroun a le talent et la passion. Il manque seulement une vision collective et une volonté politique réelle pour transformer ces atouts en succès durables.

 

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